Mes Villes Invisibles
 


 

Les villes et l’imaginaire

Celui qui vient à Alix découvre une cité propre, jeune et saturée de mouvements, pleine de bruits et de vie. Une tour en construction, d’où le Prince des lieux se sentira encore plus Prince. Des colonies de tentes sur les collines, qui deviendront, au fil des mois, maisons, écoles maternelles, églises ou mosquées, bordels. Sans doute, ce voyageur ne prêtera-t-il pas attention aux recoins de la ville, aux quartiers anciens et désertés, où une vieille palissade à la peinture écaillée, une ruelle tortueuse, où des brindilles d’herbes surgissent entre les pavés irréguliers, ou un terrain vague pris d’assaut par les bulldozers, rappellent qu’Alix a déjà mué à maintes reprises. Il ne réalisera donc pas que l’habitant maintenant âgé traverse la ville le cœur serré, le cœur serré à chaque fois qu’il sort, car quand il pense à Alix, il ne pense pas à la nouvelle tour, mais au parc où, enfant, il se battait avec son frère ; et dans son souvenir, les collines encore vierges deux ans auparavent, le sont toujours, tout comme est encore là cette maison paraît-il hantée, devant laquelle il ne pouvait passer sans un frisson, et à la place de laquelle s’élève aujourd’hui une nouvelle prison. Alix change de visage, continuellement ; mais elle poursuit des existences parallèles, dans les mémoires.

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